Comment les engrais influencent la biodiversité microbienne des sols

28/04/2025

Comprendre la biodiversité microbienne des sols

La biodiversité microbienne des sols désigne l’ensemble des micro-organismes qui y résident. Un gramme de sol peut héberger jusqu’à un milliard de bactéries, des milliers d’espèces différentes, ainsi que des spores fongiques, des nématodes ou des acariens. Cette diversité est essentielle pour :

  • Recyclage des nutriments : Les micro-organismes décomposent la matière organique, fournissant aux plantes des éléments comme l’azote ou le phosphore.
  • La santé des cultures : Certains micro-organismes protègent les plantes contre des agents pathogènes, en établissant une compétition ou en produisant des substances antimicrobiennes.
  • La stabilité des sols : Les champignons et autres organismes filamenteux contribuent à la structure du sol en liant ses particules.

Toute perturbation de cet équilibre dynamique peut avoir des répercussions sur la fertilité du sol, la productivité à long terme et la résilience des systèmes agricoles.

Les différents types d’engrais : de quoi parle-t-on ?

Avant de plonger dans leurs effets, il est important de différencier les types d’engrais. On en distingue principalement :

  • Les engrais de synthèse : Produits chimiquement, ils apportent directement des nutriments sous forme minérale, comme du nitrate, du phosphate ou du potassium.
  • Les engrais naturels (ou organiques) : Issus de matières premières naturelles (compost, fumier, vinasse...), ils libèrent les nutriments progressivement grâce à l’activité microbienne du sol.

Impact des engrais chimiques sur les micro-organismes

Les engrais chimiques, largement utilisés depuis les révolutions agricoles du XXe siècle, sont souvent pointés du doigt pour leurs effets délétères sur les sols. Voici quelques points marquants :

1. Une modification de l’abondance microbienne

Lorsqu’ils sont appliqués de manière massive, les engrais chimiques altèrent l’abondance des micro-organismes du sol. Une étude menée en Chine en 2021 (publiée dans la revue Nature Communications) a montré que des apports élevés d’azote tendent à favoriser certaines bactéries dites "opportunistes" au détriment d’espèces plus spécialisées. En conséquence, la diversité génétique des sols pourrait s’appauvrir progressivement.

2. Acidification des sols

La surutilisation d’engrais comme les nitrates d’ammonium acidifie les sols, ce qui constitue une menace majeure pour certains micro-organismes sensibles aux variations de pH. Par exemple, des champignons symbiotiques comme les mycorhizes, qui aident les plantes à capter le phosphore, voient leur activité diminuer dans des sols acidifiés.

3. Déséquilibres dans le cycle des nutriments

Les apports massifs de nutriments comme l’azote ou le phosphore peuvent perturber les cycles biogéochimiques naturellement régulés par les micro-organismes. Cela peut conduire à une accumulation de certains éléments et, paradoxalement, à des carences pour d’autres.

Les engrais organiques : une alternative plus douce pour les sols ?

En offrant une source plus progressive de nutrition, les engrais organiques sont souvent perçus comme moins nocifs pour la biodiversité des sols. Voici ce que les études montrent :

  • Une stimulation des communautés microbiennes : Les matières organiques nourrissent directement certains micro-organismes en leur apportant du carbone, essentiel pour leur activité. Cela favorise généralement une augmentation de leur diversité.
  • Des interactions positives : À long terme, les engrais organiques tendent à améliorer la teneur des sols en humus, ce qui bénéficie tant aux bactéries qu’aux champignons dégradant la matière organique.

Toutefois, tout n’est pas parfait : une mauvaise gestion des engrais organiques (exemple : excès de fumier non composté) peut provoquer une prolifération déséquilibrée de certaines espèces, entraînant des nuisances, comme des émissions excessives de gaz à effet de serre (méthane, protoxyde d’azote).

Vers un usage raisonné des engrais pour protéger la biodiversité des sols

Face aux enjeux d’aujourd’hui, une chose est claire : préserver la biodiversité microbienne est crucial pour maintenir la fertilité des sols et relever les défis liés à la sécurité alimentaire et au changement climatique. Voici quelques solutions envisageables :

  1. Adopter des pratiques agricoles intégrées : Combiner engrais chimiques et organiques permet de limiter leurs impacts respectifs tout en optimisant les rendements.
  2. Réguler les doses appliquées : Suivre les recommandations basées sur des analyses régulières des sols permet d’éviter les excès, notamment en azote.
  3. Utiliser des engrais enrichis en micro-organismes : Une nouvelle génération d’engrais dits "biologiques", contenant des bactéries ou champignons bénéfiques, émerge comme une solution prometteuse.
  4. Favoriser la rotation des cultures : Varier les cultures stimule naturellement la diversité des micro-organismes en alternant les besoins et interactions avec les plantes.

Un équilibre à trouver pour une agriculture durable

Si les engrais jouent un rôle incontournable dans la production agricole moderne, leur usage doit être pensé de manière à préserver la complexité et la résilience microbienne des sols. Les chercheurs continuent de multiplier les études pour comprendre les interactions subtils entre nutriments et microorganismes, et de nombreuses innovations voient le jour. À l’instar d’un écosystème en équilibre, il s’agit d’être attentif, mesuré et innovant. Protéger les sols aujourd’hui, c’est cultiver un avenir durable.

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