Les piliers des pratiques viticoles régénératrices
Transitionner vers une viticulture régénératrice ne signifie pas révolutionner d’emblée toutes les opérations. Il s’agit d’un jeu de leviers, à activer selon les caractéristiques du domaine : sol, climat, cépages, ambitions de qualité, contraintes économiques. Voici les pratiques phares identifiées par les instituts techniques, les associations professionnelles (Réseau Dephy, Réseau Vignerons Engagés) et les retours de terrain.
1. Stopper le désherbage total : le retour aux couverts végétaux
- Semi naturel : laisser les herbes spontanées se développer partiellement inter-rangs et sous le rang, pratique appelée “enherbement spontané”.
- Couverts semés : introduction de légumineuses, graminées ou crucifères, choisis pour :
- Fixer l’azote atmosphérique (trèfle, vesce)
- Structurer le sol en profondeur (radis fourrager, seigle)
- Offrir une protection hivernale contre l’érosion
L’efficacité s’observe rapidement : à Gaillac, une expérimentation de l’IFV (2017-2022) a montré une hausse de 15 % du taux de matière organique en 5 ans sur les parcelles couvertes.
2. Réduire l’intensité du travail du sol
- Préférer le travail superficiel, via griffage ou buttage léger, pour aérer sans bouleverser les horizons profonds
- Adopter le non-labour ou le semis direct lorsque le contexte le permet : ces techniques stabilisent les agrégats, limitent la minéralisation excessive de la matière organique et favorisent la biodiversité
Ainsi, sur le domaine de la Romanée-Conti (Bourgogne), la suppression du labour profond a permis de diviser par deux les phénomènes de ruissellement et d’érosion, tout en renforçant l’implantation de microfaune (source : Le Monde, 2023).
3. Amender pour régénérer : l’importance du compost et des apports organiques
- Compost de marc et de bois de taille : plutôt que de brûler les résidus, le retour sur sol via compostage redonne des éléments nutritifs et booste la matière organique.
- Fumier composté, engrais verts : engrais naturels pour nourrir la vie du sol sur le long terme.
Dans des essais réalisés par l’INRAE en vallée de la Loire, l’apport annuel de compost sur vignes conduisait à une augmentation de 23 % de la capacité de rétention en eau des sols au bout de 6 ans.
4. Favoriser la biodiversité fonctionnelle
- Implantation de haies, bandes fleuries, installation de nichoirs pour oiseaux insectivores et chauves-souris, lutte contre certaines maladies (mildiou) par introduction de prédateurs naturels.
- Mélange d’espèces sur l’inter-rang : jusqu’à 10 espèces végétales différentes, pour un écosystème plus complet (initiative VitiREV Nouvelle-Aquitaine).
Un sol plus vivant limite naturellement l’expansion des maladies et la dépendance aux intrants.